Rumeurs, idées reçues, clichés, superstitions, légende : qui dit vrai ? qui dit faux ?
Est-il vrai que les Bafia ont peur de la tortue ?

Est-il vrai que les Bafia ont peur de la tortue ?

Paru le vendredi, 05 mai 2017 14:22

Il se dit que les natifs de cette partie du pays ne consomment pas cet animal à carapace. Est-ce vrai ?

Osez vanter les savoureux plats à base de viande de tortue à un Bafia. Il vous regardera comme la souris devant la télé. Ne vous étonnez d’ailleurs pas qu’il vous fuit ou vous redoute. C’est que, la tortue pour le Bafia, ou le Mbamois en général (peuple du département du Mbam-et-Inoubou, dans la région du Centre), est un animal sacré. On ne le déguste ni cuit, ni cru.

La légende raconte qu’un lointain ancêtre Bafia a été sauvé par une tortue. Poursuivi par un redoutable ennemi, cet ancêtre arrive devant un profond cours d’eau. C’est sur la carapace d’une tortue qu’il parvint à échapper à ses assaillants.

Dans son livre La tortue chez les Bafia du Cameroun : mythes, représentations et symboles, paru aux éditions L'Harmattan en 2010, Joseph DONG’AROGA, natif Bafia, a des explications très édifiantes sur ce sujet. On y apprend que l’idée de sacraliser la tortue vient en effet de leurs ancêtres : les Nyokon.

Assaillis par de multiples litiges, ces derniers fendirent la tortue en deux au milieu d’une route ; ce, après moult incantations. La tortue devint plus tard le totem de ce peuple ; et surtout symbole de justice et de bonheur. Si un Bafia croise une tortue sur sa route, il sait que la chance lui sourit…

Silence

Dans l’ouvrage mentionné plus haut, Joseph DONG’AROGA raconte son enfance, marquée pas la sempiternelle question de ses camarades d’internat : Pourquoi avez-vous la tortue en horreur ? « A cette question de nos camarades répondait le silence, se rappelle l’auteur. Ou, tout au plus, un haussement d’épaules. La réponse était en nous, elle était nous. Nous étions nés et grandissions dans une culture où la tortue était vénérée, redoutée. Répondre à la question « pourquoi ? » était plus fort que nous. Nous savions que la tortue est un animal dangereux parce que nos parents nous l’avaient dit, eux-mêmes instruits par nos grands parents. Mais ce savoir était indicible.» Voilà qui est dit.

Monique Ngo Mayag

Dernière modification le vendredi, 05 mai 2017 14:29

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