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Paul Biya suspend la collecte numérique des droits de douane sur les téléphones

Paul Biya suspend la collecte numérique des droits de douane sur les téléphones

Paru le lundi, 19 octobre 2020 16:38

Dans une correspondance adressée ce 19 octobre 2020 au secrétaire général des services du Premier ministre, Séraphin Fouda, le secrétaire général de la présidence de la République (SGPR), Ferdinand Ngoh Ngoh, transmet au gouvernement l’instruction du chef de l’État, Paul Biya, demandant de suspendre l’application de la réforme consistant à collecter les droits et taxes de douane sur les téléphones et tablettes via une plateforme numérique dédiée.

« En exécution des très hautes instructions du président de la République, j’ai l’honneur de vous faire connaître qu’il demande au Premier ministre, chef du gouvernement, de faire surseoir à la mise en œuvre de la collecte par voie numérique des droits de douane et taxes sur les téléphones et terminaux importés ; soumettre à sa haute sanction un mécanisme plus approprié de recouvrement desdits droits de douane et autres taxes », écrit le SGPR.

Cette correspondance vient ainsi mettre un terme à la polémique suscitée par le projet gouvernemental de collecte des droits et taxes douanières via une plateforme numérique dédiée, avec le concours des opérateurs de la téléphonie mobile en activité dans le pays.

Cette décision intervient après le mémorandum de 14 pages adressé au gouvernement par l’Association des opérateurs de téléphonie mobile du Cameroun (AOTMC). « L’Association des opérateurs mobiles sollicite la suspension provisoire de la mise en œuvre du dispositif envisagé et la reprise de travaux entre les parties prenantes pour adresser les problématiques identifiées de manière consensuelle et bénéfique », peut-on lire dans ce document signé par Frédéric Debord, président de l’AOTMC et directeur général d’Orange Cameroun.

Une offre alternative pour évincer Arintech

Après avoir listé et détaillé les failles techniques et règlementaires que recèle la plateforme numérique devant servir d’élément principal dans le nouveau dispositif de collecte de ces taxes, l’AOTMC a fait une « offre alternative » au gouvernement. Cette offre de service exclut aussi bien Arintech, l’entreprise controversée mandatée par le gouvernement dans le cadre de cette réforme, mais aussi la plateforme numérique tout aussi controversée, à laquelle les opérateurs de mobile ont refusé de se connecter malgré l’injonction gouvernementale, en raison des réserves techniques et règlementaires émises sur le projet.

« Nous sommes convaincus qu’il est possible d’optimiser le recouvrement des droits et taxes de douane sur les terminaux mobiles, sans pour autant fragiliser nos entreprises. Nos technologies sont aujourd’hui utilisées pour faciliter la collecte de droits et taxes divers pour plusieurs administrations publiques. C’est le cas pour la collecte de la taxe foncière ou pour le paiement de frais scolaires et de frais universitaires par Mobile Money. Nous pouvons capitaliser sur ces expériences couronnées de succès pour développer une solution alternative de collecte de taxes et droits de douane sur les terminaux mobiles, sans pour autant handicaper les entreprises de téléphonie mobile », peut-on lire dans le mémorandum signé par Frédéric Debord.

Concrètement, en lieu et place de la plateforme d’Arintech, dont les limites et autres insuffisances techniques sont détaillées dans le mémorandum, les opérateurs de mobile proposent une solution qui garantira à la fois, soutiennent-ils, « une plus grande protection des consommateurs, un mécanisme de paiement contrôlé par le client, et une communication intense sur le dispositif convenu ».

Positionnement du Mobile Money

Par ailleurs, soulignent les opérateurs, cette offre alternative permettra de limiter considérablement les risques de plaintes des consommateurs ; de collecter dans des délais précis les droits et taxes de douane dus, « sans courir le risque de favoriser le développement d’une monnaie parallèle adossée sur les unités de crédit de communication » ; et « d’exclure facilement de l’assiette visée, les téléphones des personnes de passage pour un court séjour au Cameroun ».

Dans le détail, en matière de protection du consommateur, par exemple, l’AOTMC suggère au gouvernement « l’établissement d’une mercuriale des prix de vente des téléphones avant dédouanement, accessible à tous les usagers par tout moyen de publicité grand public ; la mise à la disposition des usagers d’un code USSD leur permettant de s’informer sur le statut du téléphone qu’ils veulent acheter (dédouané ou non dédouané) et le montant dû, le cas échéant ; et l’institution d’un timbre physique à apposer sur les téléphones dédouanés », pour plus de transparence lors des transactions entre vendeurs et acheteurs de téléphones et autres tablettes.

En ce qui concerne l’acquittement des droits de douane sur les terminaux mobiles, les opérateurs suggèrent deux pistes : le Mobile Money, ou alors les services de la douane elle-même, dans le strict respect de l’article septième de la loi de finances 2019, qui dispose que « les sociétés de téléphonie mobile sont tenues, en collaboration avec les services de l’État compétents ou leurs mandataires, de configurer leurs systèmes de manière à éviter toute connexion à leurs réseaux respectifs par les téléphones et tablettes non dédouanés ».

 De ce point de vue, l’AOTMC précise que « dans ce mécanisme déjà mis en œuvre ailleurs (au Liban), un délai raisonnable de 90 jours serait accordé à l’usager pour s’acquitter des droits et taxe dus, soit par Mobile Money, soit alors dans un bureau de douane. À l’expiration de ce délai, le téléphone non dédouané ne pourrait plus avoir accès à aucun des réseaux de communications électroniques disponibles au Cameroun. Des messages de rappel seraient régulièrement envoyés aux usagers concernés pour les inviter à s’acquitter de leurs droits et taxes de douanes ».

Pour terminer, les opérateurs de mobile proposent au gouvernement une « communication intense » autour du dispositif convenu, en cas d’approbation de leur offre. Car, disent-ils, « compte tenu de l’impact des réformes sur les utilisateurs, il (…) parait important qu’ils en comprennent l’origine et le sens ».

Brice R. Mbodiam

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