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Conquête du pouvoir : Maurice Kamto pris dans le piège de sa propre stratégie

Conquête du pouvoir : Maurice Kamto pris dans le piège de sa propre stratégie

Paru le mardi, 02 juin 2020 12:04

Sans aucun prétexte, Maurice Kamto, président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), s’est adressé aux Camerounais le 1er juin 2020 à travers les réseaux sociaux. En réalité, soutient un analyste politique, cette sortie du candidat classé second à l’issue de l’élection présidentielle du 8 octobre 2018 ciblait avant tout sa famille politique, en proie ces derniers jours à des guerres intestines.

Il en veut pour preuve la rupture de ban de militants tels Célestin Djamen ou Michèle Ndoki, qui soutiennent ouvertement qu’il est désormais temps d’abandonner le plan de résistance adossé sur le « Non au hold-up » pour passer à autre chose. Ou la guerre de tranchées que se livre une frange de la diaspora acquise au président du MRC.

« Le président du MRC a pris ses propres militants au dépourvu en décidant au dernier moment du boycott des élections législatives et municipales du 9 février 2020. Du coup, l’horizon politique s’est obscurci pour certains, qui auront sans doute quitté la barque si cette décision avait été prise plus tôt », croit savoir un acteur politique. Pour ces déçus, l’attente va durer cinq ans avant les prochaines élections.

Or, pour notre analyste politique, « toute traversée du désert engendre des crises de foi chez les fidèles, les amenant à se détourner du guide, pour embrasser de nouvelles idoles.... Comme les israélites du temps de Moise avec le Veau d’or ! »

Germes de la démobilisation

Ce dernier se convainc que « pour se prémunir de cela, l’entrepreneur politique est alors obligé, pour garder ses troupes, de bâtir et de renforcer la figure de l’ennemi, tout en faisant savoir à ses militants que la victoire est non seulement certaine, mais aussi toute proche. À condition de rester soudés et mobilisés ! » Une manière de soutenir que le discours de Maurice Kamto du 1er juin constitue un baroud d’honneur d’un acteur pris dans le piège d’une stratégie qui a semé les germes de la démobilisation dans son propre camp.

Cette lecture n’emporte pas l’adhésion d’un cadre du parti au pouvoir, qui préfère voir dans ce discours la persistance de Maurice Kamto dans une logique insurrectionnelle. Et qui, pour ce faire, reprend à son compte la thèse d’une succession de gré à gré au sommet de l’État, très présente ces derniers temps dans le discours de certains de ses partisans, à l’instar de Franklin Nyamsi.

Sans fournir le moindre indice pouvant étayer son propos, l’ancien ministre délégué à la Justice soutient pourtant que « les choses se précisent. Les artisans du gré à gré sont plus que jamais à l’œuvre ». Il soupçonne ces derniers de vouloir « accélérer le cours de l’histoire à leurs fins, au mépris de toutes les règles démocratiques de dévolution du pouvoir ».

Alors même que les prochaines élections présidentielles, législatives et municipales sont prévues en 2025, Maurice Kamto envisage d’ores et déjà une mobilisation « contre l’organisation de nouvelles élections populaires au Cameroun sans que soient remplis les deux préalables que sont la résolution du conflit armé dans le Nord-ouest et le Sud-Ouest et la réforme consensuelle du système électoral ».

« Tenez-vous prêts, mes chers compatriotes, afin qu’ensemble nous engagions la phase ultime de la lutte contre pour la libération du Cameroun », martèle-t-il. Mais comme pour brouiller les pistes, il appelle ses partisans à s’inscrire massivement sur les listes électorales.

« Stratagème insurrectionnel »

L’observateur averti fait alors observer que la trajectoire politique de Maurice Kamto, au cours des deux dernières années, est pavée d’intentions insurrectionnelles. Le premier acte du scénario est présenté le lendemain de la tenue du scrutin présidentiel du 8 octobre 2018. Ce jour-là en effet, le candidat du MRC ne se contente pas de s’autoproclamer vainqueur de l’élection. Il va plus loin en invitant le président sortant à lui passer le pouvoir. Après la proclamation de la victoire du président sortant, Paul Biya, Maurice Kamto lance un plan de résistance national adossé sur le « non au hold-up ».

Depuis lors, tout prétexte est bon pour défier les institutions républicaines. Prétextant une mauvaise gestion de la pandémie de Covid-19 par le pouvoir, le 3 avril Maurice Kamto engage le président de la République « sous sept jours à s’adresser aux Camerounais, lui-même, pour leur dire quelle est sa riposte contre le Covid-19 ». Il s’octroie le droit d’appeler les Camerounais « à s’auto-organiser » si Paul Biya ne répond pas à « cette injonction sans fondement juridique ».

Une posture que Jaques Fame Ndongo, secrétaire à la communication du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti présidentiel, qualifie de « stratagème insurrectionnel ». Surtout que Maurice Kamto conclut : « Si, dans les 7 jours suivant la publication de la présente déclaration le président de facto du Cameroun n’avait pas donné une preuve physique de ce que c’est bien lui qui est aux commandes de l’État (…), je me réserve le droit d’appeler à de mesures plus radicales ».

Dominique Mbassi

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