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Appels au départ de Paul Biya : gueule de bois au MRC après la faible mobilisation du 22 septembre

Appels au départ de Paul Biya : gueule de bois au MRC après la faible mobilisation du 22 septembre

Paru le mercredi, 23 septembre 2020 14:02

Le politologue Wilfried Ekanga, militant du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), est dépité. Dans les instances internes de son parti, l’activiste devenue la mascotte et figure influente de la mobilisation du MRC dans la diaspora ne cache pas sa déception. En témoignent ses messages audio destinés à un groupe restreint des responsables du parti.

« Je ne reconnais plus Douala. Où sont les gens qui étaient là à l’aéroport quand le président (Maurice Kamto, NDLR) est rentré d’Addis-Abeba. Où sont tous les benskineurs [conducteurs de motos-taxis] qu’on a galvanisés ? Quelqu’un m’a dit qu’il y avait un contingent de 600 benskineurs chauffés à bloc qui n’attendaient que le signal pour bouger. On m’a parlé des femmes qui prenaient les devants... Tous ces gens-là sont où ? », s’interroge-t-il dans un de ces éléments qui ont fuité dans les réseaux sociaux.

Mais sa déception vient également de l’absence des responsables du MRC dans les rues de Douala ce 22 septembre 2020. « Vous avez les cartes en main pour une fois, pour descendre dans la rue, les principaux responsables ne sont pas là ! », s’emporte-t-il.

Cette appréciation fait en comité restreint par Wilfried Ekanga et partagé par d’autres cadres du parti, contraste avec la position officielle de leur leader assigné à son domicile par les forces de maintien de l’ordre (FMO). Ce matin, sur son compte Twitter officiel, Maurice Kamto déclare que « les marches pacifiques, patriotiques et républicaines du 22 septembre 2020 ont connu un succès retentissant », et parle de « populations camerounaises (…) sorties massivement ».

Faible engouement

Mais à la réalité, le mot d’ordre lancé par le MRC, soutenu par six autres partis politiques et organisations civiles, a été peu suivi sur le terrain. Du moins, si l’on se réfère aux bains de foule observés autour de Maurice Kamto pendant la campagne de l’élection présidentielle d’octobre 2018. À l’issue de ce scrutin, l’agrégé en droit a été classé deuxième avec 14% des votes exprimés, selon les résultats publiés par le Conseil constitutionnel.

De plus, à Yaoundé, la capitale camerounaise, le soulèvement populaire n’a pas été au rendez-vous. Les tentatives de marches ont été étouffées par les FMO. « Ce n’est pas du tout une surprise », a commenté Shanda Tonme, le président du Mouvement populaire pour le dialogue et la réconciliation (MPDR), un parti qui se présente comme étant de l’opposition modérée.

Pour le parti au pouvoir, cette « prétendue marche pacifique, patriotique et républicaine » controversée, initiée par le MRC pour exiger le départ du pouvoir du président Paul Biya, réélu le 7 octobre 2018 à plus de 71%, au suffrage universel direct, a été « un fiasco retissant ».

Dans une déclaration écrite publiée en début d’après-midi du le 22 septembre, Jacques Fame Ndongo, le secrétaire national à la communication du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), a félicité l’opinion publique (militants, partis politiques et organisations civiles) d’avoir « massivement dit non au raccourci démocratique et oui à la démocratie authentique ».

Mais ces arguments sont contestés par les organisateurs des manifestations. Ils arguent que la faible mobilisation est le fait du fort déploiement de la police et de l’armée dans les villes de Yaoundé, Douala et Bafoussam. « Les gages que le régime a donné d’encadrer et de nous laisser manifester n’ont pas été respectés. Dans la ville de Yaoundé, on a militarisé tous les axes, les carrefours où les camarades ont essayé de se mobiliser pour converger vers la poste centrale. Les gens ont été arrêtés par anticipation et tout cela a atténué les effets et l’envie de mobilisation des camarades », a expliqué Okala Ebode, le trésorier adjoint du MRC, sur les antennes de la chaine allemande Deutsch Welle.

Ballon d’essai ?

Pour certains acteurs politiques acquis à la cause de Maurice Kamto, le fait que des militants aient bravé l’interdiction de manifester en descendant dans la rue, même en petit nombre, est une victoire. Selon le député Jean-Michel Nintcheu, responsable régional du SDF pour le Littoral, « les manifestations pacifiques du genre 22 septembre 2020 prendront certainement plus d’ampleur au fil du temps, car il est désormais opportun d’adopter la stratégie toujours victorieuse de la mangouste ».

Une posture partagée par le leader du MRC. « Une force puissante s’est levée ce 22 septembre. Elle doit continuer sa course jusqu’à l’atteinte des buts qu’elle poursuit », insiste Maurice Kamto sur son compte Twitter. Comme pour dire que l’opposant accuser de préparer un mouvement insurrectionnel ne compte pas s’arrêter-là. En attendant, le MRC déplore l’arrestation d’une centaine de militants, dont son trésorier national Alain Fogue Tedom et Olivier Bibou Nissack, le porte-parole de Maurice Kamto.

Baudouin Enama

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Dernière modification le mercredi, 23 septembre 2020 14:58

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