Interrogés sur ce qu’ils considèrent comme le problème environnemental le plus important dans leurs communautés, les Camerounais placent en tête la déforestation (23%) devant l’assainissement ou la gestion des déchets humains (23%), l’élimination des déchets (22%) et la pollution des sources d’eau (19%), indique l’enquête Afrobarometer dans une dépêche publiée le 11 septembre 2023. Le réseau panafricain et indépendant de recherches basé au Ghana a mené une enquête auprès de 1 200 adultes camerounais en mars 2022.
La déforestation a détruit plus de 1,5 million d’hectares de forêts entre 2001 et 2020, menaçant la riche biodiversité du pays, selon la Banque mondiale. « La croissance démographique, l’urbanisation et l’industrialisation entraînent la dégradation des terres et la pollution de l’eau et de l’air, exacerbées dans la région anglophone par la crise sociopolitique actuelle du pays », d’après Afrobarometer qui a déjà réalisé des enquêtes au Cameroun en 2013, 2015, 2018 et 2021.
Ce récent sondage révèle que la protection de l’environnement préoccupe les Camerounais. En effet, près des trois quarts (72%) déclarent que la pollution est un problème grave dans leur communauté, dont 32% qui la décrivent comme un problème « très grave ». Les résidents urbains (77%) sont plus préoccupés par la pollution que les résidents ruraux (67%). Les préoccupations concernant la pollution sont plus élevées parmi les personnes ayant fait des études supérieures (73% à 76%) que parmi celles ayant fait des études primaires ou moins (65%).
Pollution plastique
Les trois quarts (76%) des répondants déclarent que les sacs en plastique sont une source « majeure » de pollution au Cameroun. Selon les statistiques officielles, la matière plastique représente environ 10% des six millions de tonnes d’ordures produites chaque jour au Cameroun. La quasi-totalité des déchets d’emballages plastiques ne sont pas collectés et se retrouvent dans le milieu naturel, terrestre et marin, où ils sont parfois ingérés par des espèces marines et le bétail, entraînant leur mort.
Depuis le 1er avril 2014, la fabrication, l’importation, la détention et la commercialisation ou la distribution à titre gratuit des emballages plastiques non biodégradables à basse densité (inférieure ou égale à 60 microns d’épaisseur) est interdite dans le pays. Mais la mesure peine toujours à être appliquée, neuf ans après l’interdiction. Les Camerounais estiment que la responsabilité première de la réduction de la pollution et du maintien de la propreté des communautés incombe d’abord aux citoyens ordinaires (36%), ensuite au gouvernement (26%) et aux autorités locales (21%). Beaucoup moins (10%) pensent que la protection de l’environnement relève principalement de la responsabilité des entreprises et de l’industrie.
Ils sont également majoritaires (67%) à dire que le gouvernement devrait faire davantage que ce qu’il fait actuellement pour limiter la pollution et protéger l’environnement. Sur la question de savoir si le gouvernement devrait donner la priorité à l’emploi ou à l’environnement, les Camerounais sont divisés : 52% des citoyens interrogés pensent que la protection de l’environnement doit être prioritaire même si cela signifie qu’il y aura moins d’emplois ou d’autres perturbations dans leur vie quotidienne, tandis que 42% estiment que la création d’emplois et des revenus devraient être une priorité, même si cela signifie davantage de dommages environnementaux.
L’enquête montre que les femmes (54%) et les résidents ruraux (55%) sont un peu plus susceptibles de donner la priorité à la protection de l’environnement plutôt qu’à la création d’emplois et de revenus que les hommes (49%) et les citadins (49%). Si l’extraction des ressources naturelles est une source importante de revenus au Cameroun, contribuant à 5,5% du PIB en 2021 d'après la Banque mondiale, elle peut également être une cause de dommages environnementaux au niveau local. Bien que préoccupés par les questions environnementales, une majorité (57%) des Camerounais déclarent que les avantages de l’extraction des ressources naturelles l’emportent sur ses impacts négatifs, tels que la pollution. Même si les avis sur les activités d’extraction des ressources naturelles au Cameroun sont largement favorables, la plupart des citoyens (81%) souhaitent toutefois que le gouvernement renforce la réglementation de l’industrie extractive afin de réduire ses impacts négatifs sur l’environnement.
Patricia Ngo Ngouem