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Jean Lazare Ndongo Ndongo, préfet du Logone-et-Chari : « nous avons saisi plus de 3000 armes »

Jean Lazare Ndongo Ndongo, préfet du Logone-et-Chari : « nous avons saisi plus de 3000 armes »

Paru le jeudi, 26 mai 2022 06:07

L’autorité administrative fait le point sur la situation sécuritaire dans ce département après la flambée de violence enregistrée dès le 5 décembre 2021 dans la commune de Logone Birni. Ce conflit entre Mousgoum et Arabe Choa a fait 44 morts, une centaine de blessés et des milliers de réfugiés et déplacés internes.

Six mois après les affrontements intercommunautaires entre Mousgoums et Arabes Choa, quelle est la situation sur le terrain aujourd’hui ?

Après les affrontements, c’est le calme désormais. Le calme est revenu sur l’ensemble des unités administratives qui étaient concernées, à savoir : Kousseri, Logone Birni et Zina. La situation sécuritaire est désormais sous contrôle. Après ces affrontements, nous avons, ensemble avec les leaders communautaires, mis sur pied un certain nombre de commissions qui ont fait des descentes régulières sur le terrain pour sensibiliser les populations sur le vivre ensemble, sur la nécessité de vivre en paix.

Mais au-delà de cela l’État a entrepris, non seulement de faire revenir nos compatriotes qui se sont retrouvés au Tchad, mais également de mettre sur pied un certain nombre d’infrastructures qui peuvent permettre à nos populations d’avoir plus de ressources, notamment les ressources liées à l’eau, les ressources liées à l’alimentation même du bétail, les ressources qui permettent une vie meilleure au sein des communautés.

Il faut dire qu’à côté de cette sensibilisation et de cette mise en place des infrastructures, il y a un volet purement sécuritaire et judiciaire, parce qu’une enquête a été ouverte. Les auteurs ou complices des actes de tuerie ou de destruction de biens ont été interpellés pour la plupart et les procès sont en cours au niveau de Maroua. Avec toutes ces mesures, le calme revient et les populations vaquent de plus en plus à leurs occupations. Celles qui étaient au Tchad sont de retour pour une bonne partie. Les déplacés internes ont également rejoint progressivement leur village.

Dans l’arrondissement de Logone Birni il y a deux semaines, nous avons enregistré le retour des populations de quatre villages du canton de Hinalé, qui est l’un des plus touchés par ces affrontements, et ces populations étaient du côté de Waza. Avec ce retour, le calme revient de plus en plus. La sérénité revient au sein des populations.

Au niveau des communautés qui ont été touchées, quelles sont les principales doléances qui vous sont remontées ? Quelles sont les attentes des populations ?

Il faut partir de ce que le conflit naît d’une pression sur les ressources naturelles. Il n’y en a pas beaucoup, la population a augmenté et les ressources sont devenues rares. Nous avons le changement climatique qui est palpable. Les conditions de vie dans ces zones sont de plus en plus difficiles parce que l’eau est rare pour les populations. La principale doléance pour les populations c’est d’avoir les ressources.  Quand on parle de ressources, on parle de l’eau, on parle d’une meilleure organisation même de l’espace. Vous avez des agriculteurs et des éleveurs, et chacun dans son activité voudrait avoir plus d’espace et de ressources. C’est le choc des tensions autour des ressources qui amène les problèmes pour les gens qui vivent ensemble.

Il est question de faire une meilleure répartition de l’espace. Par exemple, où sont les pistes à bétail ? Si le bétail doit partir d’un point A vers l’eau, il est important que la piste qui existe ne soit pas occupée par ce qu’on appelle généralement des champs-piège ; où les gens mettent un piège sur la piste à bétail pour que lorsque celui-ci passe cela crée des problèmes.

Il faut faire cette meilleure répartition de l’espace. Faire en sorte qu’il y ait une meilleure gestion des infrastructures qui sont mises en place. S’il y a un point d’eau, il faut qu’il y ait un comité qui gère ce point d’eau pour que tout le monde puisse y avoir accès, mais dans une certaine forme de discipline. C’est cela les doléances des populations.

En ce qui concerne le désarmement des populations, que fait l’administration ?  

Des mesures particulières ont été prises. D’abord, nous avons sensibilisé tous les détenteurs d’armes à les restituer, c’est-à-dire toutes les armes illégalement détenues. Mais nous ne nous sommes pas arrêtés à cela. Nous avons mené des opérations qui sont même encore en cours. Des opérations de bouclage, des opérations de ratissage pour retirer les armes qui existent. Mais dites-vous bien que l’accusation qui est portée sur telle ou telle communauté d’avoir des armes de guerre n’est pas toujours facile. Ce n’est pas évident d’entrer dans une maison et de trouver une arme posée. Mais des opérations de bouclage ont été menées, que ce soit en ville, que ce soit dans l’arrière-pays. Ces opérations ont permis d’enlever un certain nombre d’armes entre les mains des populations.

Quand on parle d’armes, on parle également d’armes blanches, couteaux, machettes, lances, etc., on en a saisi plus de 3000 jusque-là. Pour les armes de fabrication artisanale, il y en a. Les armes de traite, des armes de guerre, on en a trouvé quelques-unes. Donc ces opérations vont se poursuivre. Il y a une grosse opération qui est en préparation. Par rapport au désarmement, les dispositions sont prises pour qu’il n’ait plus le règne de la terreur où chacun fait peur à l’autre parce qu’il a une arme. Nous nous attelons à faire que toutes ces armes soient retirées et que les gens puissent vivre dans la tranquillité.

Qu’en est-il des comités mis sur pied pour renforcer davantage la cohabitation ?  

Le HCR accompagne l’État dans la gestion des crises. Il est question de trouver tout ce qui est possible, tout ce qui est faisable pour que la paix revienne. Au-delà des infrastructures et toutes les mesures qui sont déjà prises, il est question de mettre les gens autour de ces comités pour discuter des problèmes du village, discuter des problèmes des communautés, trouver des solutions qui vont éviter qu’on aille parfois pour des problèmes de chèvres, pour des accusations qui ne sont pas toujours fondées, à des affrontements. Il est question que les gens apprennent dans ces comités-là à trouver des solutions, à échanger, à discuter, et au cas où il n’y a pas de solution, à aller maintenant vers l’administration pour porter le problème. Cela évite le règlement des litiges par la violence. C’est cela l’idée des comités mis en place par le HCR.

Au sujet de Boko Haram, quelle est la situation à ce jour ?

Boko Haram a été affaibli, ce n’est un secret pour personne. Les forces de défense et de sécurité ont pris le pas. Ces forces sont mieux organisées, mieux outillées et mieux structurées aujourd’hui. Cela a permis de repousser l’ennemi qui nous vient généralement de l’extérieur, un peu plus loin de la frontière. Il n’y a pas longtemps une vaste opération a été menée même de l’autre côté pour permettre que l’ennemi soit poussé encore plus loin et qu’on ait un peu de tranquillité le long de notre frontière.

Mais Boko Haram aura toujours des incursions çà et là, des attaques de prédation. Nous avons une longue frontière avec ce pays voisin et il arrive souvent que ces terroristes entrent. Il suffit que deux terroristes avec des armes entrent dans un village et cela crée la panique. Ils viennent se ravitailler, chercher de quoi manger, des habits, etc. Ils prennent un peu de tout dans les villages. Mais cela arrive de moins en moins. Notamment cette année, nous sommes au mois de mai et nous n’avons pas encore enregistré une attaque d’envergure. Contrairement, par exemple, à l’année dernière où nous avons eu une série d’attaques de nos postes avancés et avec des morts de nos forces.

Ludovic Amara  

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