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Affaire Martinez Zogo : la partie civile parle d’une tentative d’évasion et demande l’ouverture d’une enquête

Affaire Martinez Zogo : la partie civile parle d’une tentative d’évasion et demande l’ouverture d’une enquête

Paru le lundi, 04 décembre 2023 03:54

A la suite des évènements qui se sont déroulés le 1er décembre 2023 dans l’affaire Martinez Zogo, du nom de l’animateur radio enlevé, torturé et retrouvé mort en janvier dernier, Me Calvin Job, le représentent du collectif des avocats des ayants droit du défunt, demande l’ouverture d’une enquête « pour tentative d’évasion et faux en écriture publique ».

« C’est un deuxième scandale d’État, le premier, qui est le fruit de la légèreté de nos institutions, c’est celui qui a conduit à l’assassinat de Martinez Zogo. Parce que clairement, ce n’est ni plus ni moins qu’une tentative d’évasion, basée sur un document apocryphe [c’est-à-dire faux]. (…) Donc, il faudrait qu’une enquête soit diligentée d’urgence (…) pour savoir, du balayeur au tribunal militaire aux donneurs d’ordres (…), qui a fait quoi, qui est impliqué dans quoi et comment cela s’est fait », a réagi Me Calvin Job. L’avocat au barreau du Cameroun et de Paris s’exprimait au cours d’une émission spéciale organisée par la chaine de télévision Équinoxe au lendemain de l’apparition sur les réseaux sociaux de l’ordonnance de mise en liberté de l’homme d’affaires Jean Pierre Amougou Belinga et du directeur général de la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE), Léopold Maxime Eko Eko, inculpés dans cette affaire.

Une position que partage Me Cheik Ali Assad qui a participé à la même émission. « Un tribunal militaire est dans une enceinte militaire. C’est un lieu hautement sécurisé. (…) Mais à l’intérieur du tribunal militaire, on a trouvé le moyen de mettre entre les mains d’un greffier qui lui-même est militaire un document et celui-ci a eu le courage de le remettre à des avocats. La première question serait de savoir si ce greffier savait que ce document qu’il était en train de notifier aux conseils était un faux ou non. Le début de l’enquête c’est d’abord ce greffier. Et aujourd’hui, c’est la personne qu’il faudrait le plus soit protéger, soit surveiller », a indiqué cet avocat qui dit avoir déjà plaidé plusieurs dossiers au tribunal militaire. Ce dernier a même appelé au renforcement de sécurité à la prison principale de Yaoundé à Kodengui où sont détenus les inculpés de l’affaire Martinez Zogo.

« Indices d’irrégularité »

Pour ces juristes, il y a « des indices d’irrégularité » ou qui permettent de conclure au caractère apocryphe de l’ordonnance de mise en liberté du 1er décembre. Sur la forme, les références de l’ordonnance sont différentes de celles des notifications, a indexé l’avocat de la partie civile. Sur l’ordonnance, on a « DOS » alors que sur les notifications, il est plutôt écrit « DOSSIER » en entier. « Or, le référencement du tribunal militaire ce n’est pas d’écrire “DOSSIER” en entier, mais “DOS” comme dans l’ordonnance », soutient Me Job. En plus, a-t-il ajouté, dans la notification, on a la référence « ORD » au lieu de « OR » comme dans l’ordonnance. Donc, « on n’est plus dans le formalisme du tribunal militaire », conclut l’avocat.

« Dans le fond du document, on a un argumentaire qui est sorti de nulle part et qui ne correspond strictement en rien à ce qu’il y a dans le dossier, à ce qui se passe dans la procédure », a soutenu l’avocat des ayants droit de Martinez Zogo. Et pour illustrer son propos, le juriste a ajouté qu’une confrontation entre Amougou Belinga et Justin Danwé, qui l’accuse d’avoir financé la « mission Martinez Zogo », était toujours attendue. Par ailleurs, « Cette ordonnance reprend pratiquement les termes du communiqué des conseils de monsieur Maxime Eko Eko », a pointé Me Cheik Ali Assad, sans préciser de quel communiqué il s’agit. « Cette ordonnance de mise en liberté, c’est l’aboutissement de ce communiqué des avocats de Maxime Eko Eko. Parce que tout avait déjà été mis en marche, tout avait déjà été mis en branle pour arriver à cette ordonnance-là », a cependant renchéri l’avocat de la partie civile.

De plus, Me Job a estimé que la procédure devant conduire à la libération d’Amougou Belinga et Eko Eko n’a pas été respectée. « Déjà, (…) quand des personnes sont impliquées pour des faits qui sont susceptibles de peine de mort ou de peine à vie, on ne peut prendre une ordonnance de mise en liberté sans les élargir. (…) En somme, on aurait dû prendre une ordonnance de non-lieu, même partiel, avant de prendre cette ordonnance de mise en liberté », soutient l’avocat au barreau du Cameroun et de Paris.

« Aveu de culpabilité »

Les avocats de l’homme d’affaires et du patron des services de contre-espionnage camerounais affirment que l’ordonnance querellée leur a été « régulièrement notifiée par ministère et diligence du greffier d’instruction ». Mais pour Me Job et Me Cheik Ali Assad, cette notification est également irrégulière. « En procédure pénale, l’avocat se contente d’assister son client, il ne le représente pas. C’est pour ça, quand il faut notifier ce type d’ordonnance, on extrait la personne concernée et on lui notifie l’ordonnance devant son avocat. Jamais au grand jamais, on vous dira qu’on notifie directement aux avocats », a soutenu le conseil de la partie civile. « Lorsqu’il s’agit d’une personne inculpée et placée sous mandat de détention, depuis toujours, le juge d’instruction envoie un mandat d’extraction, il avise le conseil de la personne poursuivie, et notifie [l’ordonnance] à la personne poursuivie en présence de son avocat », renchérit son confrère.

 « Ce qui s’est passé hier (1er décembre 2023) est un véritable aveu de culpabilité. Ceux qui ont organisé ça, nous ont fait comprendre finalement que voilà les véritables personnes responsables de ce qui s’est passé et qu’on voulait soustraire à la justice », a affirmé Me Calvin Job. Ce dernier s’est d’ailleurs dit inquiet pour la suite de l’instruction. « Parce que je vois jusqu’où on est capable d’aller pour vouloir soustraire des individus de leurs responsabilités », a-t-il justifié. Pour lui, il faudrait voir plus clair sur les évènements du 1er décembre dernier pour « espérer retrouver une justice sereine, sécurisée (…) et rendre justice à Martinez Zogo ».  

Aboudi Ottou

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