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Joshua Osih, pour une opposition modérée

Joshua Osih, pour une opposition modérée

Paru le mardi, 09 avril 2024 14:56

En prenant la tête du Social Democratic Front (SDF) en octobre 2023, le député Joshua Osih (55 ans) a promis à sa famille politique de transformer ce parti de gauche. Parti de 43 sièges à l’Assemblée nationale en 1996, le SDF qu’hérite le natif de Kumba dans la région du Sud-Ouest a chuté à 5 députés à l’issue du scrutin de février 2020. Un chiffre revu à la baisse depuis la récente exclusion du député Jean-Michel Nintcheu. La presse internationale qui suit de près le parcours de Joshua Osih, caricature son « chantier » comme un jeu d’équilibre entre l’aile radicale de l’opposition et le pouvoir de Yaoundé. Certains chroniqueurs politiques n’hésitent pas à parler d’une opposition « modérée ». Même si pour beaucoup, il n’y a rien de nouveau dans la démarche de Joshua Osih. « À bien regarder de près, il n’y a pas de véritable changement au SDF. Car il n’y a pas une nouvelle vision. Il [Joshua Osih] s’inscrit dans ce que John Fru Ndi a été dans ses dernières années d’opposition », analyse Léonel Loumou, du cabinet Orin Consulting, qui conseille certains politiques locaux.

Joshua Osih admet lui-même qu’il est le prolongement de son pygmalion, John Fru Ndi. « Il m’a tout appris », avouait le député sur les ondes de RFI après la mort de son mentor. Quand il parle de l’homme politique modéré qu’a été Fru Ndi, Joshua Osih est loquace : un homme de consensus, un homme qui croyait fermement qu’il fallait se garder de porter l’estocade mortelle à un adversaire politique… Joshua Osih conclut qu’un adversaire politique n’est pas un ennemi.

Mais personne n’a oublié le début de la décennie 1990, les fameuses années de braise pendant lesquelles le SDF de John Fru Ndi n’a jamais hésité à défier le régime de Paul Biya. Après le résultat de l’élection présidentielle de 1992, le chairman, arrivé en deuxième position, conteste sa défaite et appelle les Camerounais à descendre dans la rue. À en croire Joshua Osih, c’est juste l’endroit du décor. Dans une récente interview, il rappelle que des solutions radicales avaient été proposées à John Fru Ndi à 1992, mais il les a déclinées. « Il a refusé de gouverner le Cameroun sur le sang des Camerounais », indique Joshua Osih.

Ce dernier sait donc de qui tenir pour mener à bien la barque du SDF. Premier challenge : changer cette perception radicale que l’opinion a du parti de la balance. « Nous croyons aux valeurs et aux vertus de la démocratie », faisait-il savoir à RFI. Le SDF s’est pour cela gardé d’encourager les Camerounais en colère à descendre dans la rue pour contester les résultats de la dernière élection présidentielle. Plus encore, le SDF a refusé de servir de caution politique à l’irrédentisme anglophone dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (Noso).

En plus de soigner l’image du SDF, Joshua Osih veut aussi expurger les dernières séquelles de la guerre de clochers qui l’a longtemps opposée au député Jean-Michel Nintcheu, qui a depuis été expulsé du parti. Certains cadres du SDF ne cachent pas leur agacement quand la presse essaye de rappeler cette guerre intestine. Ils expliquent invariablement que Joshua Osih est désormais à la manœuvre et que le parti se projette clairement vers la prochaine élection présidentielle. En 2018, Joshua Osih avait terminé quatrième avec un score de 3,35 %. Jamais le parti n’était descendu aussi bas. Sauf qu’au SDF, on nuance cette débâcle en indiquant que plus de 800 000 électeurs dans le Noso, le vivier électoral du parti, n’ont pas pu voter. Le rendez-vous est donc pris pour 2025.

Ange Michel Nga

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